Nouvelles de Flandre
Minorités nationales: Les Francophones de Flandre déterminés à être entendus par le Groupe d'experts de la CIPE


S'agit-t-il d'un simple "oubli" ou, plus grave, d'une "manœuvre politicienne" pour ne pas déplaire aux nationalistes flamands de la N-VA qui ne veulent pas entendre parler de minorité francophone sur le sacro-saint territoire de la Flandre, toujours est-il que les Francophones de Flandre n'ont pas été consultés par le Groupe d'experts de la Conférence interministérielle de politique étrangère (CIPE) chargés de définir le concept de minorité nationale. Les experts étaient pourtant favorables à une telle consultation.

Rétroactes - Lors du deuxième Examen périodique universel (EPU) de la Belgique à l'ONU début 2016, la Suisse et la Hongrie ont recommandé à notre pays de ratifier la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales.

Suite à cela, la Coalition des associations francophones de Flandre (CAFF) (1), par la voix de l'Association pour la promotion de la francophonie en Flandre (APFF), a demandé, le 2 mai 2016, de rencontrer le Groupe d'experts de la CIPE.

Précisons que la CIPE est placée sous la présidence du ministre des Affaires étrangères Didier Reynders (MR) et qu'elle réunit des représentants du gouvernement fédéral et des entités fédérées pour discuter de dossiers interfédéraux de politique étrangère. Parmi ces dossiers figure l'épineux dossier de la ratification de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales que la Belgique a signée en 2001, mais qu'elle n'a toujours pas ratifiée 17 ans plus tard.

Assez curieusement, notre demande de rencontrer les experts de la CIPE est restée sans réponse depuis lors.

Quelle n'a pas été notre surprise, en ayant finalement accès, récemment, au rapport de la réunion du groupe d'experts du 14 juin 2016, de découvrir, deux ans plus tard, que notre demande avait bel et bien été prise en compte à l'époque!

A la lecture du rapport, nous apprenons d'abord que "pour obtenir plus de certitude quant à la mise en œuvre possible de la Convention-cadre, le groupe de travail estime qu'il est utile de consulter le Comité consultatif (ndlr: de la Convention-cadre du Conseil de l'Europe pour la protection des minorités nationales) sur certains aspects de la notion de minorité nationale telle que interprétée par le Comité. (...)

D'autre part, les conséquences concrètes d'une ratification de la Convention-cadre (p.ex. quant à la législation sur l'emploi des langues) doivent également être vérifiées".

Action concrètes

Trois actions concrètes sont discutées dans ce fameux rapport:
- La visite d'une délégation du groupe d'experts au Conseil de l'Europe à Strasbourg;
- Une nouvelle réunion du groupe d'experts, à laquelle d'anciens ou actuels membres du Comité consultatif seraient invités;
- L'éventuel accueil de l'Association pour la promotion de la francophonie en Flandre (APFF) "qui a fait une demande formelle en vue d'une rencontre avec le groupe de travail".

Le point 4 du rapport, intitulé "contacts éventuels avec les associations concernées", nous intéresse tout particulièrement. "En ce qui concerne l'APFF, les membres estiment nécessaire de prendre par avance connaissance de leurs points de vue et questions ainsi que, le cas échéant, de ceux d'autres associations concernées qui le solliciteraient.

Leurs points de vue et questions au sujet de la Convention-cadre peuvent en effet être utiles pour compléter plus avant la liste de questions du Comité consultatif avec des questions concrètes "du terrain". Les experts présents estiment par ailleurs intéressant d'apprendre de telles associations dans quelle mesure certaines minorités éventuelles souhaitent se voir protégées en tant que telles, étant donné que ce souhait est également une condition de l'application de la Convention-cadre."

Conclusions opérationnelles

Viennent ensuite les "conclusions opérationnelles" dont la première concerne l'APFF: "Il est convenu que le président confirme à l'APFF qu'il a communiqué leur requête en vue d'une rencontre avec le groupe d'experts, sans avoir reçu de réponse définitive, et les invite au nom du groupe d'experts à transmettre leurs points de vue et questions par écrit, de manière à ce que le groupe d'experts puisse en prendre connaissance avant de décider d'une éventuelle rencontre."

Saluons la position des experts de la CIPE qui tient compte des recommandations de l'ONU (2). L'ONU précise que "la reconnaissance du statut de minorité ne relève pas de la seule décision de l'État. Conformément à l'interprétation authentique faite par le Comité des droits de l'homme de l'ONU, l'existence de minorités doit être établie selon des critères objectifs. Tout doit être fait pour garantir le respect du principe d'auto-identification".

A l'ONU d'ajouter: "Les États doivent recueillir des données ventilées (...), y compris dans le cadre des recensements nationaux. (...) Ces données permettent de mieux appréhender l'importance numérique et la situation des minorités. (...) Ces données doivent se fonder principalement sur l'auto-identification, et la société civile et les groupes minoritaires doivent être associés à l'ensemble du processus".

Signalons également que la Commission de Venise du Conseil de l'Europe, a qui l'on doit la Convention-cadre, a, non seulement, déjà défini la notion de minorité nationale mais également désigné les minorités nationales à protéger en Belgique. A savoir, notamment, la population francophone établie en Région flamande et la population néerlandophone établie en Région de langue française.

Forts de ce que nous venons d'apprendre, nous sommes plus déterminés que jamais:
- à être enfin entendus par les experts de la CIPE;
- à vouloir que soit relancé le processus de ratification de la Convention-cadre car, d'après Le Vif/L'Express, il semblerait que les experts ne se soient plus rencontrés depuis la réunion de 2016 et;
- à réclamer l'ouverture d'un large débat sur la question des minorités nationales. Cette initiative a d'ailleurs été soutenue, pendant la dernière campagne électorale, par notre Premier ministre, alors président du MR.

Charles Michel avait en effet affirmé, concernant le rapport de la Belgique en vue de son deuxième EPU, que: "le MR souhaite que la Belgique ratifie la Convention-cadre sur la protection des minorités nationales conformément à la Résolution 1301 de l'Assemblée du Conseil de l'Europe qui reconnaît par ailleurs le statut de minorité aux Francophones de Flandre. (...)

Le MR est favorable à ce qu'une large consultation de la société civile soit organisée préalablement à la rédaction du rapport. Pour être complète, cette consultation doit s'ouvrir à des organisations représentant divers courants d'opinion. En ce qui concerne le volet linguistique, ceci implique de donner la parole à l'APFF mais aussi aux organisations de promotion de la langue néerlandaise en Belgique".

Il n'est jamais trop tard pour bien faire!


Edgar FONCK

(1) La Coalition des associations francophones de Flandre (CAFF) regroupe six associations représentatives des 310.000 francophones de Flandre, en ce compris la périphérie de Bruxelles et l'entité des Fourons: l'Action Fouronnaise, l'Association culturelle de Dilbeek (ACD), l'Association de Promotion des Droits Humains et des Minorités (ADHUM), l'Association francophone de Leeuw-Saint-Pierre, l'Association pour la Promotion de la Francophonie en Flandre (APFF) et Citoyens de Zaventem.

(2) Recommandations formulées par le Forum sur les questions relatives aux minorités du Conseil des droits de l'homme, vingt-huitième session, A/HRC/28/77 § 10 et 24.


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