Nouvelles de Flandre
Rencontre avec Arnaud Galy, rédacteur en chef de la plateforme Agora francophone

De la photo au journalisme écrit, de son petit village de Dordogne à l'Europe de l'Est puis aux confins de l'espace francophone, Arnaud Galy a tissé un riche réseau au fil de ses voyages et reportages pour aboutir à la mise sur pied d'une plateforme consacrée à la francophonie.

N.d.F.: Si vous deviez vous présenter en quelques mots?

A.G.: Mon père travaillait dans l'industrie textile. J'ai donc beaucoup déménagé de Paris aux Vosges puis à la région lyonnaise, au gré des fermetures d'usines du secteur. Je suis retourné à Paris pour faire des études de photo et d'audiovisuel. En tant qu'étudiant déjà, j'avais créé une "agence" de photos sportives. J'ai aussi pas mal voyagé pour suivre des compétitions automobiles notamment. J'ai travaillé dans une agence de presse locale mais j'ai très vite voulu élargir mes horizons et je suis devenu indépendant. Grâce à des rencontres avec des personnes de mes anciens réseaux, je suis devenu correspondant pour une agence en Finlande, une en Corée, … Mon plus gros client était un magazine allemand "Ecoute" consacré à la France et à la francophonie en Allemagne. J'ai aussi collaboré avec des guides touristiques comme le "Michelin". Les voyages ont rythmé ma vie principalement en Europe centrale et orientale.

N.d.F.: Pourquoi un attrait spécifique pour ces pays?

A.G.: C'était une époque où tout bougeait, tout était en plein développement. Il y avait une jeunesse dynamique qui voyait se profiler un avenir meilleur. C'était palpitant de se retrouver là, au cœur de l'événement. Mais aussi de découvrir leur patrimoine et de passer du temps avec ces populations même si ce n'était pas toujours facile surtout d'un point de vue humain. J'y ai créé des liens et tissé un vaste réseau de contacts francophones.

N.d.F.: Vous avez alors créé le magazine ZigZag. Dans quelles circonstances?

A.G.: Des problèmes de santé et de mobilité m'ont contraint à lever le pied et à avoir un style de vie plus sédentaire. Avec un couple d'amis, nous avons créé ZigZag, un magazine en ligne sur l'actualité francophone qui permettait de rationaliser les acquis, les expériences accumulées au fil des années. On a complété le réseau par l'amitié pour obtenir des contributions. Les contacts se sont élargis très vite. On a peu à peu eu la certitude de correspondre à un besoin et le grand plaisir de recevoir des offres de contribution spontanée. Et puis les événements se sont enchainés. RFI nous a contactés deux ans après la mise en ligne, pour faire une émission sur notre magazine. C'était là une belle reconnaissance.

N.d.F.: Vous n'en êtes pas restés là...

A.G.: Non effectivement, l'étape suivante a été la collaboration avec l'Année francophone internationale. Loïc Hervouet, président de l'AFI et ancien directeur de l'école de journalisme de Lille nous a demandés de rapprocher nos réseaux. On publiait ZigZag et l'AFI publiait une revue annuelle reprenant les faits marquants de l'année écoulée dans les divers pays de l'espace francophone. On a créé la plateforme Agora francophone. En croisant nos réseaux et nos techniques, l'internet, le papier, on a élargi le lectorat. Quand je regarde nos statistiques et que je vois tous les pays et même des iles que je ne connaissais pas où les gens se connectent pour nous lire, cela me fait énormément plaisir.

N.d.F.: Comment voyez-vous l'avenir de la Francophonie?

A.G.: La Francophonie institutionnelle, son implication dans la marche du monde n'aura d'avenir que si sa voix est plus forte, que si ses prises de position ne sont pas que des communiqués de presse mais si la Francophonie fait partie des acteurs qui comptent et est invitée aux tables de négociation. Pour ce qui est de la francophonie, il ne faut pas multiplier les centaines de locuteurs francophones pour se valoriser. Arrêtons de penser qu'un habitant de RDC ou un Libanais est un francophone uniquement parce qu'il habite un pays membre de la Francophonie. Essayons plutôt de créer des relations constructives et intelligentes comme point d'appui pour développer des politiques culturelles.

N.d.F.: Et la francophonie en Flandre qu'est-ce que cela vous inspire?

A.G.: Je trouve un peu désespérant que des francophones dans un pays comme la Belgique soient obligés d'aller à l'ONU pour faire respecter leurs droits. Cela me paraît déstabilisant surtout pour un problème linguistique. Cela démontre un problème politique de base.

N.d.F.: Quel est votre meilleur et votre pire souvenir concernant la francophonie?

A.G.: Le meilleur d'abord. Il y a quelques années, je me trouvais dans une toute petite épicerie au fin fond de la Pologne. Voyant ma plaque d'immatriculation française, l'épicière a essayé de me parler en français. Elle est arrivée à m'expliquer que cela faisait 50 ou 60 ans qu'elle n'avait pas parlé le français qu'elle avait appris à l'école. C'est très anecdotique mais l'effort que cette femme faisait pour me parler dans ma langue était très touchant. Pour le négatif, je n'ai pas un mauvais souvenir mais il me semble que beaucoup de gens impliqués dans la vie de la francophonie, ne sont pas très convaincus de ce qu'ils essaient de promouvoir, de mettre en place. Dans les Sommets ou forums francophones, on se sent parfois bien seul…

N.d.F.: Pour conclure, que pensez-vous de la Journée de la Francophonie 2016?

A.G.: Le 20 mars est une belle initiative, c'est entendu. Mais je suis toujours méfiant car je me rends compte que dans ces moments de partage, comme les Journées ou même les manifestations de masse, les participants ne sont pas mobilisés pour les mêmes raisons. Pour moi, le 20 mars doit être l'occasion de montrer au monde que les francophones et les francophiles ont un désir commun de s'ouvrir aux autres, une volonté affirmée de mieux éduquer la jeunesse et qu'ils sont porteurs de tolérance tout en étant inflexibles sur les droits humains fondamentaux. Le message enregistré par Michaëlle Jean, la Secrétaire générale de l'OIF, pour le 20 mars, est l'expression d'une résistance à l'obscurantisme et d'un besoin de solidarité. Ce sont des notions qui me touchent davantage que la bataille autour de l'accent circonflexe et de la pureté de la langue qui envahit les salons et les réseaux sociaux.


propos recueillis par
Anne-Françoise COUNET


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