Nouvelles de Flandre
Après Québec, Liège s'est offert un honorable Forum mondial de la langue française

Le 2e Forum mondial de la langue française - une initiative de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) - s'est déroulé avec succès du 20 au 23 juillet dernier à Liège.

Il a permis des échanges entre 1200 jeunes francophones de 90 pays dont des pays non membres de l'OIF, comme l'Argentine, le Brésil, la Chine, le Japon, ou le Sri Lanka.

Ils étaient venus défendre plus de 130 "projets" (petites et moyennes entreprises, initiatives relevant de l'action culturelle, sociale, sportive, éducative, etc). Leur présence avait fait l'objet, lors de l'ouverture, au théâtre bien-nommé Le Forum, d'un hommage appuyé, et même par moment lyrique, de la part de la secrétaire générale de l'OIF, Michaëlle Jean, qui avait fait le déplacement à Liège au même titre que de nombreuses personnalités belges.

Mais c'est surtout au bon millier de jeunes présents que Mme Jean s'est adressée, leur disant notamment: "Vous démontrez que la langue française a le pouvoir de susciter mobilisation, passion, écoute et engagement (...). Vous voulez faire vivre une francophonie dans l'action, au plus près des réalités, une francophonie plus performante". C'est, ajouta-t-elle "une belle fin de non-recevoir adressée aux sceptiques, à tous ceux qui crient au déclin et à la mort programmée de la langue française. Ce sont d'ailleurs souvent les mêmes qui renoncent à l'employer dans les colloques, les grandes conférences ou les négociations internationales".

Pas de diversité instrumentalisée

"Vous qui vivez en Afrique, dans les Amériques, dans la région Asie-Pacifique, au Moyen-Orient ou en Europe, poursuivit-elle, qui, pour la plupart, parlez à la maison, avec vos amis, ou dans votre environnement immédiat, une autre ou plusieurs autres langues, vous vous êtes nourris, formés, structurés à partir de traits de civilisation différents, à partir de manières différentes de voir, de penser et de dire le monde".

"Par votre présence, expliqua-t-elle en substance, vous revendiquez, non pas une diversité instrumentalisée, radicalisée, voire xénophobe, mais une diversité culturelle pacifiquement assumée, placée sous le signe de la fraternité, de l'équité, de la force de la loi et non pas de la loi de la force sous le signe aussi du bien-être et de la dignité de la personne humaine et non sous celui du seul profit marchand ou financier".

Et Mme Jean d'encourager les participants à "faire un usage fédérateur et constructif des technologies de l'information et de la communication, des réseaux sociaux, et de tous ces nouveaux modes de communication instantanée" que l'on voit émerger, en les prévenant cependant: "profitez de ce que la mondialisation a de meilleur".

Le "message de Liège"

A ce forum, on ne chercha pas à définir des conclusions ou une proposition "d'actes du congrès", mais seulement ce que les participants ont appelé "le message de Liège". En voici les principaux constituants. Tout d'abord, la nécessité de "s'ouvrir aux autres en s'inspirant de toutes les diversités. Car la langue française est plurielle. Son évolution appartient à ses locuteurs. Au contact des autres langues qu'elle côtoie, elle se transforme, s'enrichit et se fortifie. Elle accouche de nouveaux mots, de nouvelles formes, dans des brassages linguistiques".

Les participants souhaitaient aussi faire connaître la vitalité de "leurs" langues françaises (au pluriel) et découvrir celles des autres, "car ce sont les différences qui font la richesse des cultures".

Autre aspiration: "outiller chaque citoyen pour qu'il prenne sa place dans la société", favoriser les techniques et les méthodes de créativité permettant à tous les francophones d'inventer la langue de demain. Utiliser les technologies, les plateformes et les outils en ligne et soutenir l'apprentissage et le développement professionnel de ceux qui transmettent les savoirs. En effet, il est fondamental de favoriser les apprentissages des techniques issues de tous les domaines notamment culturels.

Les participants suggèrent aussi de déployer le numérique pour accélérer le développement de projets innovants et faciliter ainsi l'accès à la formation à distance et aux contenus, en demeurant attentifs à l'inclusion des zones rurales dans cette dynamique. Ils soulignent également le besoin de mettre en place un cadre normatif pour renforcer la qualité de service et la valorisation des projets.

Une préoccupation constante est en outre - on s'en serait un peu douté - de "réseauter, connecter et partager", signe de l'importance accordée aux échanges de pratiques et d'idées innovantes entre francophones. Et, bien sûr, c'est le développement des médias sociaux qui permet de réseauter pour s'enrichir de la culture des autres. Bref, être citoyen, acteur autonome et créatif. Une meilleure connaissance de la langue, de sa construction, de ses composantes et de ses origines permet aux francophones d'agir en citoyens responsables.

Les participants suggèrent donc d'amener la culture auprès de chaque citoyen - particulièrement ceux qui n'y ont pas accès - et d'adapter les moyens de diffusion afin de toucher des populations précarisées ou non sensibilisées. Autrement dit encore, selon la formule-slogan du forum: "créactivons-nous!"

Critique à propos des visas

On ne serait pas complet cependant sans faire échos aux criti-ques qui ont fusé quant aux refus de visas, ce qui a d'ailleurs fait l'objet d'un commentaire du commissaire général Philippe Suinen. Ce dernier a rappelé que si la francophonie c'est 274 millions de personnes sur tous les continents, tous ne sont visiblement pas les bienvenus en Belgique. Une centaine de délégués, principalement d'Afrique occidentale et centrale, qui souhaitaient participer au forum, se sont vus refuser leur visa de la part des autorités belges. "On avait déjà connu ce problème au Québec, dans les mêmes proportions, donc c'est chaque fois comme ça alors que ça ne peut pas être comme ça."

Bref, à part cet iatus, le 2e Forum de la langue française fut certes un "_cru_" un peu jeune et fruité... mais de toute manière un très bon cru.

 

André BUYSE


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