On se souvient qu'en 2004, Lille se transformait en Capitale européenne de la Culture. Une année forte pour la ville et la région qui, depuis, se poursuit à travers Lille3000. Ni festival, ni biennale, cette manifestation propose à un large public, la découverte des cultures à travers des artistes contemporains.

Du 10 octobre au 4 janvier, Lille3000 nous fixe rendez-vous au Tripostal (un ancien bâtiment consacré au tri du courrier et transformé en lieu incontournable de la création contemporaine et devenu une véritable référence culturelle et artistique) pour aller à la rencontre de dix-huit collectionneurs, installés aux environs de Courtrai, région où la concentration d'amateurs d'art est assez exceptionnelle. "Ces divers collectionneurs avisés et passionnés, connus dans le monde entier, répondent à leur amour de l'art dans ce qu'il a de plus divers et pour ce qu'il peut susciter d'émotion et de réflexion sur le monde. Loin d'une démarche spéculative ou d'effets de mode, collectionner est à leurs yeux un art de vivre", comme le souligne Martine Aubry, maire de Lille.

L'exposition "Passions secrètes" révèle quelques-uns des trésors de ces collectionneurs flamands. Plus de 140 oeuvres de 80 artistes internationaux sont réunies. Elles racontent les coups de coeur de leurs propriétaires et offrent un formidable aperçu de la création des années 70 à nos jours.

Plusieurs parcours thématiques créent un dialogue inédit entre les œuvres de ces collections indépendantes. Celui autour d'une représentation féminine. Tantôt mère, amante, séductrice, la femme est depuis toujours un des sujets d'inspiration des artistes, tant à travers l'exaltation du corps, l'évocation de la maternité ou le fantasme. Les œuvres de Louise Bourgeois, Sergey Bratkov, Anselm Kiefer, Mimmo Rotella, Thomas Ruff, ... montrent la diversité de cette représentation chargée de sensibilité, d'émotions et d'émancipation.

Autre thème fort dans l'histoire de l'Art: le miroir, qui est l'objet d'un autre cheminement. Imposant et jouant avec le processus de transformation de l'image, il réunit identité et différence et renvoie le visiteur à lui-même mais aussi à l'autre avec les oeuvres de Robert Barry, Daniel Buren, Ann Veronica Janssens, …

Une troisième promenade guide le visiteur au coeur d'une certaine Amérique. Il faut entendre par ce titre les visions, souvent politiques, du rêve américain, ou encore celles d'une Amérique critiquée, synonyme d'impérialisme et d'hégémonie qui trouve ses sources dans les mouvements new-yorkais des années 60 et 70, entre luttes raciales et guerre du Vietnam.

Enfin, une partie de l'exposition rend hommage aux artistes belges, comme Michaël Borremans, Dirk Braeckman, Ruben Bellinkx, Thierry De Cordier, Jan Fabre, Luc Tuymans, Jan Van Oost, Jacques Verduyn... Ils viennent pour certains réveiller ici les fantômes de l'ironie de l'autodérision, ou encore du symbolisme et du surréalisme si présents chez les artistes qui les ont précédés.

Anne-Françoise COUNET