Nouvelles de Flandre
Le Qatar qualifié pour entrer dans la Francophonie

Comme on sait, le sommet de Kinshasa a permis l'élargissement du "club" des Etats et territoires membres de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) à trois membres dont deux sont des nouveaux venus, l'Uruguay et le Qatar, ce dernier pays ayant fait son irruption par la grande porte à l'OIF puisqu'il devient d'emblée membre associé.

Le cas du Qatar est exemplatif à plus d'un titre et notamment parce que certains commentateurs n'admettent pas facilement qu'il soit devenu célèbre dans le monde dès la fin des années 1990 ni que, depuis les années 2000, il se soit fait connaître grâce au rôle international joué par sa chaîne de télévision informative Al Jazeera que tous, à commencer par les Américains, ont comparé à la "CNN arabe".

Soutenue par la famille souveraine Al Thani, et disposant donc de très gros moyens, cette station de télévision, investigatrice et bien informée, affichant un audimat de 45 millions de téléspectateurs, fait de l'ombre aux médias occidentaux, certes plus démocratiques, indépendants et libres, mais qui n'en craignent pas moins la concurrence d'une institution arabe ne reproduisant pas le "politiquement correct" de la Maison Blanche ou celui des organes de presse européens.

De sorte que tous les moyens et prétextes ont été jugés bons pour dénigrer le Qatar, avec ces arguments prétendument "massues" selon lesquels le Qatar n'a rien de "francophone" (faux), ni de démocratique (spécieux: car l'Emirat est le moins éloigné des critères démocratiques, par comparaison avec la situation politique dans les autres Etats arabes de la région) ni d'incompatible avec les règles du libre échange et du commerce international (ici, il s'agit d'un argument de "bouc émissaire", lancé par ceux qui râlent de voir le Qatar investir massivement dans l'industrie et les services européens).

L'argument le plus fantaisiste, le plus imprégné de mauvaise foi, est celui de l'absence de liens entre le Qatar et la francophonie. On verra plus loin que ces liens, au contraire, sont nombreux et importants.

Certes, c'est en partie grâce à une campagne de lobbying, notamment auprès de pays africains membres de l'OIF (tels la Guinée et Djibouti) que le Qatar a pu être désigné en octobre dernier comme l'un des 57 membres associés à la Francophonie institutionnelle, donc comme un membre plus actif que les 20 Etats qui sont simplement "observateurs". Avec le Qatar, l'OIF compte désormais 77 Etats et régions membres.

L'émirat mérite à ce titre d'être présenté en détail

C'est un pays grand comme un tiers de la Belgique, péninsule oblongue s'avançant dans le golfe Persique, dont la population s'élève à près de 1,8 million d'habitants (la moitié seulement a la citoyenneté qatarie, le reste étant composé de travailleurs émigrés venus surtout de pays arabes et musulmans) sans compter les résidents temporaires, coopérants et autres "expats" (dont pas moins de 200.000 francophones!).

Les trois quarts de la population totale résident à Doha, la capitale, ville portuaire située à l'est de la péninsule, le reste étant réparti sur les villes et les ports côtiers. L'essentiel du territoire est constitué d'un désert aride et plat. La langue officielle est l'arabe. L'anglais est la langue des affaires. Le français vient ensuite, suivi des langues des travailleurs immigrants (ourdou, hindi, persan, turc).

La région resta pauvre et sous-développée jusqu'à la découverte, à la fin des années 1930, puis la mise en exploitation d'exceptionnels gisements de pétrole par la Anglo-Iranian Oil Cy, l'émirat étant devenu à partir de ce moment un "protectorat" britannique.

En 1968, lors de la constitution d'une fédération d'émirats arabes, le Qatar s'y joignit pour s'en séparer rapidement et obte-nir son indépendance totale en 1971.

Depuis, c'est le boom dans tous les sens du terme: démographique (de 20.000 habitants en 1953 à 1,8 million en 2012), économique, immobilier, industriel, financier, politique et religieux (plus d'un millier de mosquées en 2012): 3e producteur mondial de gaz naturel et premier exportateur de gaz, 19e producteur de pétrole (1400 barils/jour), gros opérateur financier, immobilier et touristique, gestionnaire d'un réseau routier intérieur et aérien international (Qatar Airways) surdimensionné, mais également... premier émetteur mondial de CO2 par habitant.

Les Qatari bénéficient d'un revenu presque similaire à celui des pays industrialisés (PIB/habitant de plus de 78.000 dollars). Il n'y a pas de parti politique ni de parlement mais un conseil consultatif de 45 membres dont les deux tiers sont élus au suffrage universel, y compris par les femmes. La constitution précise que l'émir régnant, monarque absolu, ne peut rien faire qui aille à l'encontre de la charia (la loi islamique), ce qui ne veut donc pas dire que la base du droit soit la charia.

Plus francophile que bien d'autres associés de l'OIF

Enfin quelques mots sur la francophilie de l'émirat qatari: au grand dam des "parrains" britanniques, les représentants du Qatar ont introduit leur dossier d'adhésion aux Nations Unies... en français. Le souverain Cheik Hamad Ben Khalifa Al-Thani, qui séjourne régulièrement dans sa villa dans le midi de la France, veille scrupuleusement à ce que tous les membres de la famille régnante apprennent et parlent le français; il a fait installer à Doha une antenne de la prestigieuse école militaire française de Saint-Cyr; il a validé tous les investissements "français": participation significative dans les groupes Vinci, Veolia, HVMH, Lagardère, Vivendi, Dassault (achat de Mirage 2000), Total, les hôtels Royal Monceau et Concorde Lafayette à Paris, Carlton, Martinez et Majestic à Cannes, l'immeuble du siège du Figaro et celui du magasin Virgin à Paris, le club de football Paris-Saint-Germain, etc, etc.

Mais la cerise sur le gâteau francophone du Qatar c'est, la forte présence française sur les plans culturel, scolaire, linguistique et démographique. Le pays compte 200.000 locuteurs de français, ce qui représente 9 pc de la population totale. Le lycée français Bonaparte, de Doha, est réputé et connu dans toute la région. Il ne fait aucunement double emploi avec le lycée franco-qatarien Voltaire (lycée trilingue français, arabe, anglais) ni avec l'Institut français ni avec l'Alliance française (cours de langue et de culture), ni encore avec l'Association Doha Accueil (club culturel des familles francophones de Doha).

Enfin deux mots sur les médias: la radio FM Oryx (longueur d'onde 94FM) émet en français 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24: elle est très écoutée des 100.000 expatriés tunisiens, marocains, algériens et libanais, alors que de son côté la chaîne de télévision Al Jazeera met actuellement en place des émissions en langue française. Pareille implication du Qatar dans la francophonie a joué un rôle certain dans le choix de Doha pour le récent sommet sur le climat.

On le voit au terme de cette présentation: le Qatar est légitimement qualifié pour faire partie de la francophonie institutionnelle.

QATAR

Nom officiel: Etat du Qatar

Superficie: 11.437 km2 (Belgique: 32.545 km2)

Population: env. 1.800.000 d'habitants

Capitale: Doha (1.450.000 hbts)

Langue officielle: arabe

Monnaie: Riyal qatari QAR - 1 EUR = +/- 4,84 QAR

Religions: musulmans (77,5%), hindouistes (9%), chrétiens (8,5%)

Indice de développement humain: 37ème rang mondial en 2011

Adhésion à la Francophonie: 2012

Statut: membre associé

André BUYSE

 


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