Nouvelles de Flandre
Le succès de "Courrier international":
métamédia ou agence de presse pour les particuliers ?

Né à Paris le 8 novembre 1990, Courrier international, l'hebdomadaire réalisant une revue mondiale de la presse (sans être pour autant une revue de la presse mondiale), n'a cessé de s'imposer dans le paysage médiatique moderne, devenant, malgré la dictature de l'Internet qui n'existait pas encore au moment de sa fondation, un média incontournable pour le lecteur francophone réputé intellectuel, actif, motivé, ouvert sur le monde, étudiant, professeur, cadre peu ou prou diplômé.

Le succès est manifeste et la formule géniale dans sa conception qui n'a guère connu de grosses transformations depuis sa création.

Courrier international n'est pas un journal qui représente son lectorat, bien que ce dernier lui soit fidèle, avec un tirage hebdomadaire d'environ 250.000 exemplaires. Et ceci pour la simple raison que, sélectionnant des articles de médias venus de tous les coins de la planète, de tous bords idéologiques ou philosophiques, de tous poids, d'influence, diffusion et audimat, ce titre fait en sorte que ses journalistes comme ses lecteurs se mettent "à la place de l'autre": le mot "place" n'étant pas, ici, seulement locatif mais culturel, sociologique, civilisationnel.

On y apprend les nouvelles, du pays ou du monde, à l'aune d'un habitant du Texas, de Sibérie, de Moldavie, de Birmanie, du Sichuan chinois, du Swaziland ou encore... de la Patagonie chilienne, bref d'un ailleurs peu connu, souvent même inconnu, du lecteur lambda membre de la communauté francophone internationale, qu'il soit ou non intellectuel.

Rappelons la genèse et l'histoire encore très brève de ce média mythique. Le journal est né de la rencontre, un an après la chute du mur de Berlin, de quatre intellectuels français, Jean-Michel Boissier, Hervé Lavergne, Maurice Ronai et Jacques Rosselin, qui créent une revue internationale multiculturelle de la presse pour un lectorat insatisfait de ce que lui proposent alors les grands titres nationaux: Le Monde, Le Figaro, Libération, l'Humanité, La Croix, L'Express... Dès la deuxième semaine, c'est le succès: 40.000 exemplaires.

Il est vrai qu'on venait de connaître la première guerre du Golfe de Georges Bush et que l'information sur celle-ci fut transmise via le prisme de CNN, intéressant certes, mais insuffisant et passablement orienté. Or, dès ce moment, Courrier international reproduisait des articles de journaux maudits sinon interdits parce que publiés en Irak ou en Jordanie.

La formule plut et fit des émules: en 2005 est lancée l'édition portugaise et à la fin de la même année le Courrier Japon. Puis en 2009, est fondée l'édition belge publiée en coopération avec l'éditeur de La libre Belgique, SAIPM (laquelle, à notre sens, ne se justifie pas vu la relative communauté de vue avec le lectorat francophone de France).

Aujourd'hui la rédaction du Courrier compte une trentaine de permanents pratiquant un métier qu'on pourrait comparer à celui de journaliste d'agence : tout est dans la sélection et la traduction, mais pointues, universelles et d'un haut niveau qualitatif. Cette sélection est réalisée en partie sur base des " alertes " envoyées par une autre trentaine de journalistes vigies établis partout dans le monde : Europe, Asie, Amériques, Afrique et Océanie.

Le corpus des médias et "webzines" (magazines en ligne parfois clandestins, interdits ou exilés) cités compte 900 titres, que la rédaction présente sous forme de brèves "annonces cartes de visite". Ici on regrettera que ce genre de cartes de visite soit parfois de nature à induire en erreur sur la représentativité du média: journaux chinois, russe, iranien... ou syrien présentés dans les termes mêmes pro- posés par leur éditeur.

Car dans les pays dictatoriaux ou non-démocratiques, majoritaires, la presse n'est qu'un organe du pouvoir, ceux qui la confectionnent sont propagandistes, fonctionnaires, apparatchiks: des scribes étrangers à ce que nous considérons comme une presse libre et indépendante. Courrier international a trouvé la parade en présentant en outre des textes de ce que l'on appelait naguère les "samiszdat", autrement dit des feuilles circulant sous le manteau et qui malgré le tirage confidentiel étaient plus représentatives que la presse étatique.

Conclusion: oui Courrier international est indispensable, incontournable, mais toujours améliorable.

 

André BUYSE

Informations: www.courrierinternational.com


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