Le film français qui a le plus affolé le box-office en cette fin 2011 est, sans conteste, "Les intouchables" d'Eric Toledano et Olivier Nakache. Un aristo raffiné mais tétraplégique engage en guise d'homme de compagnie un Black peu rôdé aux codes du XVIe arrondissement. Tout les oppose et pourtant, la mayonnaise prend.

La comédie offre un regard normal sur les handicapés, les dialogues font mouche, la construction est habile et le duo d'acteurs fonctionne illico: François Cluzet, au sommet de son art, et Omar Sy, un black tous muscles et toutes dents blanches dehors !

Il y a ensuite, "L'exercice de l'Etat" de Pierre Shoeller, coproduit par les frères Dardenne. Olivier Gourmet y est un ministre français des transports filmé dans son quotidien, avec son cortège d'ambition, sacrifices, renoncements, compromissions, trahisons et mensonges, mais aussi amitiés brisées et absence de vie privée. Olivier Gourmet se glisse avec maestria dans ce costume de ministre passant sa vie l'oreille scotchée à son gsm, déconnecté de la réalité sociale et familiale.

Ou encore "L'art d'aimer" de et avec Emmanuelle Mouret mais aussi Judith Godrèche, Julie Depardieu, Ariane Arcadie et François Cluzet. C'est un marivaudage délicieusement bavard, un peu à la manière d'Eric Rhömer, où cinq femmes parlent d'amour et de désir: savoureux.

Sans oublier "17 Filles" de Delphine et Muriel Coulin, la transposition à Lorient, en Bretagne, d'une histoire vraie: 17 adolescentes décident d'être enceintes ensemble. Au lycée, en famille, en ville, c'est l'incompréhension. Leur désir de changer le monde interpelle. Mais le film ne cherche pas à expliquer ce geste, il se borne à montrer, entre sobriété et esthétisme.

Enfin, "Les Neiges du Kilimandjaro": plus qu'une chanson de Pascal Danel, c'est désormais le dernier film de Robert Guédiguian qui, toutefois, tourne quelque peu en rond. Avec cette histoire d'un couple de gens plutôt pauvres qui gagne une cagnotte devant lui permettre de faire un grand voyage mais qui se fait aussitôt braquer par des bandits en situation précaire, le réalisateur marseillais revient dans son quartier de l'Estaque avec ses acteurs fétiches, Ariane Ascaride et Jean-Pierre Darroussin, pour tirer une sorte de bilan de ses bons vieux idéaux de toujours. Si c'est par moments émouvant et touchant, c'est aussi fort naïf.

Pierre GERMAY