Nouvelles de Flandre
Lectures: Le journal d'Alexis Curvers

Les lecteurs qui se rappellent le succès de Tempo di Roma d'Alexis Curvers, situent leur souvenir dans une époque où la pensée des auteurs colorait encore la vie quotidienne. La publication par Catherine Gravet du Journal d'Alexis Curvers (1924-1961) est un précieux acquis. Il est édité avec goût et érudition, et le lecteur, dès les premières pages, comprend fort bien qu'il fut jugé nécessaire de le publier.

Au début de sa vie, Alexis Curvers fut professeur de français au lycée grec d'Alexandrie. Il épousa une des premières femmes nommées professeur, Marie Delcourt, nettement plus âgée que lui, car il avait été son élève à l'université de Liège. Neuf cahiers ont été sélectionnés parmi les archives de l'auteur, de 1924 à 1961. Ce sont là des années qui nous informent sur notre histoire, mais aussi sur les doutes et les enthousiasmes d'un homme qui réfléchit au sens de la vie, la religion, les contradictions entre la pensée et l'état du monde. Témoignage d'éthique personnelle, de doutes et de déceptions, d'opinions politiques et philosophiques, ce journal révèle ou rappelle un vécu d'une densité extraordinaire.

Ce n'est pas étonnant que Gide aimât s'entretenir avec Curvers. Les pensées du Belge sont à la hauteur des meilleurs passages de la prose de son contemporain français. Quand Curvers rencontrait son ami Gide, ou d'autres qui reprennent vie dans ce livre, il nous les présente comme si nous les rencontrerions nous-mêmes, ce qui ne manque pas de charme. On retrouve, par exemple, parmi des tas de réflexions et opinions, la réaction tout à fait dépassée et peut-être oubliée des catholiques lorsque la liturgie de la messe a changé du latin à la langue du peuple, et que le curé put être secondé par les diacres qui reprirent la lecture d'une partie des textes. Personnellement, les opinions liées à l'actualité du début et du milieu du XXe siècle m'intéressent passionnément, car les dires de nos parents et grands-parents résonnent encore dans nos mémoires, et la juxtaposition du présent et du passé est une expérience de qualité!

Ce remarquable journal Curvers ne sera lu que par peu de lecteurs, mais j'ose espérer que je rends service à ceux que le livre pourrait intéresser, les lecteurs qui ne refusent pas de se replonger dans le passé. Ce retour en arrière est remarquablement illustré en bas de page par les nombreuses notes de l'éditrice Catherine Gravet. Un livre qui fait honneur à la Belgique.

 

Nicole VERSCHOORE

Alexis Curvers, Journal (1924-1961), Edition, notes et introduction de Catherine Gravet, Université Paul Verlaine à Metz, Centre écriture


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