Chaque année, "L'année francophone internationale" (AFI) rend compte des événements et débats qui animent l'espace francophone. Loïc Hervouet, après une riche carrière dans la presse, en assure aujourd'hui la présidence. Il a accepté de répondre à nos questions pour mieux faire connaître la revue à nos lecteurs.
NDF: Quand l'AFI est-elle née, dans quelles circonstances et avec quels objectifs?
L.H.: Lorsque le professeur Michel Tétu (Canada), Pierre
Alexandre ou Robert Jouanny (France), fortement encouragés par
le ministre français de la Francophonie de l'époque,
l'historien Alain Decaux, décidèrent en 1991 de publier
le premier numéro de l'AFI au sein du CIDEF (Centre
International de Documentation et d'Echanges) de l'Université
Laval, ce fut pour marquer le sillon et renforcer la
visibilité de ce puissant mouvement francophone qui prenait
une ampleur culturelle et politique jusqu'alors
inégalée.
Depuis, le relais a été assuré chaque
année par plus de deux cents auteurs, universitaires ou
journalistes, pour mener à bien dix-huit parutions denses de
quelques centaines de pages à chaque fois. Cette
communauté d'auteurs bénévoles, sur les cinq
continents, est un précieux témoignage d'une
francophonie vivante et utile.
L'objectif majeur de la revue est d'informer, de tenir en permanence
une chronique non officielle, libre et
désintéressée, des bonheurs et des vicissitudes
de la famille francophone, de nourrir les échanges autour de
valeurs partagées, sans obligation mais avec enthousiasme et
conviction, dans le respect et le goût de la
diversité.
Les administrateurs de l'AFI ont représenté une
vingtaine de nationalités sur les cinq continents.
NDF: Que trouve-t-on dans la revue?
L.H.: En premier lieu une synthèse de l'actualité
politique, économique, sociale, culturelle et scientifique des
douze derniers mois dans les différents pays (70) qui
composent la communauté francophone officielle, mais aussi un
éclairage des activités francophones dans certains
autres pays de la zone.
C'est la fonction première assignée à la revue
par ses fondateurs.
Quelques exemples:
- je voyage dans six mois à Sainte Lucie: comment diable
puis-je savoir ce que les médias de mon pays ne m'ont
sûrement pas dit des événements locaux, et
profiter au mieux de ce déplacement?
- je dois recevoir une délégation ... roumaine, ...
malgache, ... vietnamienne: comment éviter des faux-pas et
grâce à la collection de l'AFI, trouver le
résumé de ce qui s'y est passé depuis cinq ou
dix ans?
Des tableaux synthétiques comparatifs sur les principales
données statistiques actualisées de chaque pays des
différentes zones de la Francophonie permettent des
comparaisons éclairantes et stimulantes sur leur
développement.
Pour chaque parution, des dossiers thématiques transversaux
enrichissent aussi la revue. En 2008, ce fut bien sûr un
hommage international et original à Aimé
Césaire, en même temps qu'à Michel Tétu.
La revue de 2010/2011 abritera ainsi un dossier spécifique sur
les apports de la Francophonie à "cinquante années
d'indépendances en Afrique". L'AFI veut de cette façon
à la fois informer et permettre des débats, en toute
indépendance d'esprit, comme le veut la culture
universitaire.
Depuis peu, la revue insère aussi des repères de
lecture sur les ouvrages publiés par ses propres auteurs, mais
aussi sur les principales parutions traitant de la Francophonie.
NDF: A côté de cette publication, l'AFI a-t-elle d'autres activités?
L.H.: Elle a publié et continue de diffuser des
monographies synthétiques sur "La Francophonie en Suisse", ou
"La Francophonie canadienne", sinon "Les Inuits dans la
Francophonie", etc.
Elle a aussi pour vocation l'organisation de colloques internationaux
sur des thèmes spécifiquement francophones. Cela a
été le cas à Paris-Sorbonne en 2001, à
Québec en 2003, à la bibliothèque d'Alexandrie
en 2003. Chaque fois, des Actes témoignant de la richesse des
débats ont été publiés par
l'association.
Ainsi les Actes du colloque sur "La transmission des connaissances,
des savoirs et des cultures", sous le titre "Alexandrie,
métaphore de la francophonie", ont accueilli en 292 pages une
quarantaine de contributions sélectionnées, d'Abdou
Diouf ou Michèle Gendreau-Massaloux à Dominique Wolton,
en passant par Jean-François Mattei, Robert Solé ou
Ismail Serageldin, le patron emblématique de cette
bibliothèque mythique. Des contributions classiques, des
apports érudits, des réflexions inattendues: ce compte
rendu parcourt les quatre chapitres du colloque: la cité, le
livre, la pensée, ou le journalisme, avec une foi
affirmée dans les valeurs de l'échange francophone.
NDF: L'AFI n'évolue pas en vase clos. Avec quelles organisations entretenez-vous des liens privilégiés?
L.H.: Naturellement, l'association qui édite la revue en
coopération avec l'Université Laval (Québec), et
dispose de locaux à la Bibliothèque francophone
multimédia de Limoges (France), entretient, en toute
indépendance, les meilleures relations avec l'OIF, et est
représentée à tous les Sommets. Elle a
noué des liens particuliers avec le Réseau mondial
francophone des écoles de journalisme, le Réseau
Théophraste, avec l'Union de la Presse Francophone, avec les
associations les plus diverses de la communauté francophone,
comme l'Association internationale des professeurs de
français, ou l'Association internationale des Notaires
francophones.
L'AFI est membre de l'AFAL (Association francophone d'amitié
et de liaison). Partout, ses membres sont disponibles pour faire
jouer au maximum les synergies dont a besoin la Francophonie pour
vivre et se développer.
NDF: En tant que président de l'AFI, quels sont vos projets pour l'avenir?
L.H.: Renforcer la revue et sa diffusion. Pérenniser son développement malgré les reculs des subventionnements et concours officiels. Accueillir toujours plus de débats. Accentuer son caractère "scientifique" à la fois par son contenu et l'élargissement de son comité de lecture et de son comité de parrainage, sans pour autant céder à une tentation élitiste. Nous tenons, à l'AFI, à ce métissage entre savoir et actualité, réactivité et réflexion, journalisme et spécialisation. C'est notre caractère propre, ancré dans la vie, tout simplement.
Propos recueillis par Anne-Françoise COUNET
Informations: www.anneefrancophone.eu