Nouvelles de Flandre
Une place privilégiée pour le français aux J.O. de Vancouver

Les Jeux olympiques d'hiver vont se dérouler à Vancouver, en Colombie-Britannique, province canadienne où la population francophone est très minoritaire. Un accent très particulier sera mis pour que ces festivités soient marquées par la diversité culturelle et linguistique.

La Colombie-Britannique est située sur la côte ouest du Canada. C'est la troisième plus grande province de la Fédération après le Québec et l'Ontario. Elle est dotée d'une géographie tout à fait distincte. Là où l'océan Pacifique rejoint le continent, émerge une suite d'îles dont la plus importante est l'île de Vancouver qui mesure plus de 400 km de long et sur laquelle se trouve Victoria, la capitale. Vancouver, la ville de loin la plus importante, se trouve sur le continent. C'est là qu'auront lieu les Jeux olympiques d'hiver et paralympiques.

Arrivée des Européens

Il y a plus de 6.000 ans déjà, la Colombie-Britannique était habitée par de nombreux groupes autochtones amérindiens qui vivaient des ressources de la mer et des forêts de l'intérieur. En 1778, le capitaine James Cook de la Marine royale britannique débarque sur l'île de Vancouver. Quinze ans plus tard, le premier Européen à traverser les montagnes Rocheuses, arrive par la voie terrestre, accompagné de six voyageurs Canadiens-Français. Il sont suivis, quelques dizaines d'années plus tard, par d'autres compatriotes. Les francophones s'installent alors, de façon permanente, dans la région.

Au milieu du 19ème siècle, suite à la découverte de minerais d'or, de nombreux immigrants affluent et les Canadiens de langue française, qui représentent alors 60% de la population, se retrouvent minoritaires. Leur proportion ne cessera de décroitre. En 1901, les francophones ne constituent plus que 2,5% de la population. Au cours du vingtième siècle, la Colombie-Britannique continue de se développer grâce à une immigration en provenance du reste du Canada et, après les années soixante, grâce à une arrivée massive de migrants asiatiques.

Une région multiculturelle

Un recensement de 2006 révèle que la population de la province compte plus de quatre millions d'habitants dont un quart d'allophones. Les langues les plus parlées sont le chinois (différentes variétés), le pilipino (langue des Philippines), l'espagnol et le portugais, le vietnamien, l'arabe, le coréen, le japonais, etc. La population autochtone, les descendants des Amérindiens, constitue la population indigène la plus importante du Canada après l'Ontario. Ils ne représentent toutefois que 3,8% de la population de cette province.

En ce qui concerne le français, la situation demeure relativement stable avec environ 1,3% de la population et ce, grâce au déplacement de population d'une province à l'autre. Ce pourcentage reste, malgré tout, très faible en comparaison aux autres minorités.

D'autre part, ces francophones isolés géographiquement et culturellement, constamment exposés à l'anglais dans la rue, à l'école, au travail, tendent à se fondre dans la majorité anglophone environnante si bien qu'à peine 15_% d'entre eux utilisent le français à la maison.

Le statut du français

Au gouvernement provincial de la Colombie-Britannique, le français ne possède aucun statut officiel, pas plus que l'anglais d'ailleurs. En effet, la province n'a jamais légiféré en matière de langue. Cependant, même si l'anglais n'est pas reconnu juridiquement comme langue officielle, il a acquis ce statut dans les faits.

Depuis leur arrivée sur le territoire, les francophones se sont toujours regroupés en petites associations. En 1945, ils s'organisent plus officiellement et créent la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique qui va défendre leurs droits culturels et linguistiques, principalement en matière scolaire.

Après de nombreuses années de revendications, fin des années septante, des écoles en français voient le jour. Ces écoles rencontrent un beau succès auprès des familles francophones bien entendu mais aussi parmi les anglophones qui veulent permettre à leurs enfants de devenir bilingues. Cette avancée est liée aussi à l'article 23 de la Charte des droits et libertés qui accorde le droit à l'enseignement en français partout au Canada "là où le nombre le justifie".

Hormis le système scolaire, les francophones de la province n'ont guère de droit linguistique. Au niveau de la législature et des tribunaux, le français n'est utilisé dans les débats du Parlement et dans la rédaction des lois que comme privilège, non comme droit. Un député francophone peut employer le français s'il y tient, mais aucun service de traduction simultanée ne lui sera fourni. Dans les cours de justice de juridiction civile, il est possible tout au plus d'exiger la présence d'un interprète.

La Loi sur les langues officielles du gouvernement canadien protège également les francophones, qui peuvent bénéficier, en principe, de services bilingues quand ils s'adressent à des organismes du gouvernement fédéral. Dans la réalité, les services fédéraux bilingues n'existent pratiquement pas car les francophones ont pris l'habitude de toujours communiquer en anglais.

Expérience bilingue aux J.O.

En 2010, la ville de Vancouver sera l'hôte des Jeux olympiques d'hiver. Les autorités locales et olympiques vont tenter de faire "tout ce qui est possible pour que ces Jeux soient exemplaires du point de vue de la diversité culturelle et notamment pour le respect de la langue française, deuxième langue du Comité olympique et du Canada" comme l'a souligné l'ancien président de la Confédération suisse, Pascal Couchepin, grand témoin de la Francophonie. Le comité organisateur de Vancouver a d'ailleurs lancé une campagne de sensibilisation en ce sens, même si, comme il l'a reconnu: "imposer le bilinguisme en Colombie-Britannique, une province où la question du français est bien souvent secondaire, ne s'est pas fait naturellement car à Vancouver, il y a beaucoup plus d'Asiatiques que de francophones".

On est arrivé, malgré tout, à ce qu'un certain nombre de nouveautés dans l'histoire des Jeux soient mises en place, comme la rédaction d'un guide décrivant les meilleures pratiques pour assurer le bilinguisme. Guide qui sera utilisé pour les Jeux de Londres et de Rio. Parmi ces pratiques bilingues, on trouvera, par exemple, une signalétique en deux langues notamment à l'aéroport international de Vancouver où, en général, aucune annonce n'est faite en français, même pas pour les avions vers Montréal. Il y aura partout des personnes capables de répondre en français. On pourra les reconnaître grâce à une épinglette avec l'inscription "bonjour". Et s'il n'est pas possible de parler à un francophone, un téléphone permettra de poser des questions en français. Les programmes, les billets, les annonces, les cérémonies et les spectacles accorderont autant d'importance à la langue de Molière qu'à celle de Shakespeare.

Cet accent mis sur le bilinguisme est non seulement une revendication de la Francophonie mais aussi, il faut le souligner, une volonté du gouvernement fédéral canadien qui a dégagé pour cela, pas moins de sept millions de dollars. Pour les autorités canadiennes, les Jeux olympiques de Vancouver seront une sorte de test pour la qualité du bilinguisme au Canada.

 

Anne-Françoise COUNET


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