Vincent Leroy est un de ces auteurs extrêmement modestes qui par ses investigations et sa précieuse documentation procure au lecteur des informations souvent à moitié oubliées si pas tout à fait nouvelles, qui devraient pourtant faire partie de la mémoire belge, sans connotations récentes ni ressentiment.

Quatre ouvrages ont déjà paru. Dans Le poète belge Emile Verhaeren (*), l'auteur se penche sur un poète francophone, Flamand par ses racines, son caractère et la passion qui domina son œuvre. C'est aussi grâce à ses publications historiques en prose et à sa renommée de poète que Verhaeren attira jusqu'en Russie l'attention de l'étranger sur le passé flamand, donc sur la Belgique, son art et ses villes. Né à Saint-Amand sur l'Escaut, ne répétait-il pas, n'écrivait-il pas: j'aime passionnément la Flandre! Dans son portrait du poète, Vincent Leroy ne fait pas d'analyse littéraire, il nous rappelle la vie de Verhaeren, l'amitié des souverains Albert Ier et Elisabeth, leurs rencontres à La Panne pendant la guerre…

Cette première biographie, comme les suivantes, Le prince Charles de Belgique (*), Les 70 ans de la reine Paola (*), ainsi que les Chroniques du règne d'Albert II (*), suivent l'ordre chronologique de la vie, jusqu'à la date de la parution du livre. Le portrait de la reine Paola et celui du prince Charles débutent par les antécédents.

Si, après la lecture, le lecteur a l'impression de vraiment connaître celui que Vincent Leroy lui présente, ce n'est pas qu'il analyse et suggère son interprétation - qui comme toute interprétation serait avant tout celle du biographe, donc subjective. Il passionne par l'excellence et l'objectivité de son étude. Les faits rapportés sont essentiels, et le lecteur reçoit, en direct, documents et références. On ne peut qu'admirer la concision du style, car les livres de Vincent Leroy ne sont pas de gros volumes. On les lit d'un trait, pris par la curiosité, ensuite, pour la qualité de l'information. Et lorsqu'on range l'ouvrage lu, ce n'est pas sans l'intention de les consulter encore.

Le prince-Charles de Belgique

Si le portrait d'Émile Verhaeren nous rappelle beaucoup de choses, Le prince Charles de Belgique (*), se lit comme un roman. C'est un livre remarquable et bouleversant. Il retrace une page historique mémorable (1944-1950), rendant hommage à un excellent régent, ensuite, intimement et sans contraintes, au prince solitaire qui se retira en Flandre, à la côte belge. Le Régent fut fort apprécié par les Alliés et la population belge, aimé de tous sauf de ses proches. Après le retour de son frère en 1950 et l'avènement au trône de son neveu le roi Baudouin, Charles quitta Bruxelles et vécut de nombreuses années à Raverside. Il y resta jusqu'à la fin de ses jours et se sentit si Flamand qu'il signa ses tableaux, les exposa et se fit connaître sous le nom de Karel van Vlaanderen. Dans la biographie de Vincent Leroy, les données caractérielles et autres de ses relations avec sa royale famille - très espacées - suivent la chronologie de l'enfance, la jeunesse, la guerre, son gouvernement de l'après-guerre et la question royale. Dans son ensemble, le message est étonnant!

Aux nombreuses citations des meilleurs auteurs et historiens - André de Staercke, Georges-Henri Dumont, la reine Marie-José, Churchill, Gunar Riebs &endash; Vincent Leroy ajoute de pertinents détails extraits des lettres des années trente du prince Charles à son frère le Roi, du journal d'Alfred Bastien, d'autres correspondances et écrits de Dominique Paoli et de la princesse Clémentine. Il s'agit de détails intimes peu connus. Parmi les 161 pages, notons également le discours du Régent prononcé lors de sa prestation de serment, le 21 septembre 1944, une belle lettre du 15 novembre 1982 du roi Léopold III à son frère, et la réponse, fin novembre, du Régent à son frère, enfin, quelques phrases de l'éloge funèbre du 6 juin 1983 d'Edward Leemans, président du Sénat. Elles consacrent le solitaire non-conformiste.

Les 70 ans de la reine Paola

Grand lecteur des Archives de la Chambre et du Sénat belges, Vincent Leroy l'est aussi de la correspondance et des journaux intimes de tous ceux qui ont joué un rôle prédominant en Belgique, en arts ou en politique. Après Chroniques du règne d'Albert II (*), qui se borne aux travaux et occupations du roi actuel et sont forcément incomplets, voici que vient de paraître Les 70 ans de la reine Paola (*). Nous y découvrons un premier chapitre étonnant qui retrace jusque dans le détail - remontant jusqu'au XIIIe siècle - les origines belges de la reine Paola. Elles deviennent spécialement intéressantes au XVIIe siècle, car son aïeul, Jacques Mosselman, fut bourgmestre de Bruxelles.

Nous retrouvons ses descendants dans les affaires, à Liège e.a., et par épousailles, de génération en génération, affiliés et apparentés à Jacques-André Coghen, le premier ministre des Finances de notre pays (1831), ensuite député, membre fondateur de l'Université libre de Bruxelles et commissaire de la Société Générale. Son beau-fils, Théodore Mosselman du Chenoy est aussi libéral. Lorsqu'en 1877 une descendante Mosselman épouse l'Italien Fulco Beniamino Ruffo di Calabria et s'installe à Naples. La famille devient italienne, papale et très pieuse.

Dans ce portrait de l'enfance, la jeunesse, les années belges de la princesse et ensuite de la reine,Vincent Leroy offre au lecteur une compilation claire, objective, adroite et, en son ensemble, révélatrice de toute une vie - personnalité, travaux, évolution psychologique. Il n'omet aucun aspect de la longue crise conjugale des souverains, ni des multiples controverses, accusations, procès et attaques de la presse, dans lesquelles les princes furent impliqués. Le tout procure un passionnant rappel des quinze dernières années de la politique actuelle belge. Enfin, quatre chapitres étant consacrés aux portraits individuels, successivement du Roi Albert II, du prince Philippe, de la princesse Astrid et du prince Laurent, nous savons maintenant "tout" sur la famille royale...

Nicole VERSCHOORE

(*) Les ouvrages peuvent être commandés à l'auteur, rue de la Ferme 57, 7050 Erbisoeul. Les trois premiers au prix de 8 EUR, le dernier de 10 EUR, à verser au compte 063-9856296-64 de Vincent Leroy, même adresse.