Nouvelles de Flandre
Rôle et avenir des associations culturelles francophones

Les politiciens flamands rêvent d'un territoire homogène, débarrassé des francophones. Ils dénoncent de manière de plus en plus virulente les transferts financiers entre la Flandre et la Wallonie. Et le manifeste publié récemment par des patrons flamands indépendentistes n'est pas fait pour calmer le jeu. Les francophones sont taxés de profiteurs qui vivent sur le dos de la Flandre!

Les tensions entre Flamands et francophones sont préoccupantes. A tel point que dans son discours prononcé à l'occasion de la réception de Nouvel An des plus hautes autorités de l'Etat, le Roi Albert II a rappelé la Flandre à l'ordre. Il y a des "situations inégales entraînant des transferts entre régions", mais on ne peut y répondre ni par "un repli sur soi de chaque région; non plus dans le développement de sous-nationalismes, ni dans un séparatisme explicite ou feutré".

L'avenir des associations culturelles francophones en Flandre dépend bien évidemment de l'évolution de cette situation.

Rompre l'isolement des francophones

Les associations culturelles francophones jouent plusieurs rôles. Elles permettent tout d'abord aux francophones de se rencontrer. C'est pour eux un des seuls moyens de vivre pleinement leur attachement à la langue et à la culture françaises et de rompre leur isolement.

Les bibliothèques privées francophones, quant à elles, pallient au manque de livres en français dans les bibliothèques communales. En effet, d'après une directive flamande, toute bibliothèque doit disposer d'un quota de 75% de livres en néerlandais pour être agréée et bénéficier de subventions.

Les activités des associations francophones sont aussi l'occasion pour les néerlandophones qui le désirent, d'entretenir et d'enrichir leur connaissance du français.

Problèmes de financement et de locaux

Comme toutes autres associations, les associations culturelles francophones doivent disposer de moyens financiers et de locaux pour exercer leurs activités.

La Communauté française ne pouvant plus intervenir et la Communauté flamande ne voulant pas intervenir, les associations francophones fonctionnent, dans la plupart des cas, grâce au mécénat.

Il s'agit d'un mécénat privé, car les grandes entreprises ont beaucoup trop peur des réactions de leur clientèle flamande. Les mécènes sont heureusement très motivés. Mais autant dire tout de suite qu'il y en a peu. Ils ont, pour la plupart, vécu l'évolution de la situation de la langue française en Flandre et sont donc assez âgés.

Qu'adviendra-t-il lorsqu'ils ne seront plus là? La relève est-elle assurée?

En ce qui concerne les locaux, il est devenu quasiment impossible pour une association culturelle francophone d'avoir accès à des locaux communaux, tels que les centres culturels. Même si un responsable politique veut intervenir au nom de la liberté d'expression, il trouvera presque toujours sur sa route un extrémiste flamingant s'écriant: "De l'argent flamand pour les francophones… C'est scandaleux!" Le responsable politique en question aura vite compris que s'il veut être réélu, mieux vaut qu'il se taise.

Les sociétés privées qui louent des locaux sont aussi réticentes. Elles craignent les problèmes. Tout le monde a encore en tête les incidents survenus lors du cycle de conférences "Exploration du monde". Les manifestants flamands faisaient une haie devant l'entrée pour "accueillir" les francophones en les huant et en leur jetant tomates et œufs pourris. Lorsqu'ils ne venaient pas avec des ambulances et prétendaient qu'ils ne repartiraient que lorsqu'elles seraient pleines.

Seules les associations disposant de leurs propres infrastructures sont à l'abri. Mais là encore il faut de l'argent, ne fut-ce que pour couvrir les frais d'entretien.

Il est clair que l'avenir des associations francophones est aujourd'hui entièrement entre les mains des autorités flamandes.

Face à ce tableau assez noir, notons toutefois deux éléments positifs: l'arrivée de nouvelles chaînes de télévision en français sur le câble et via l'adsl, de même que la Quinzaine Française d'Anvers qui a eu lieu en octobre dernier.

La Flandre s'ouvrirait-elle à la francophonie? Ou courtiserait-elle la France qui n'a pas encore signé la Convention-cadre sur la protection des minorités nationales?

La voie de la raison

Alors qu'une nouvelle réforme de l'Etat se profile au lendemain des élections de 2007, il faut souhaiter que Flamands et francophones mettront cartes sur table une bonne fois pour toutes afin d'apporter une solution définitive au contentieux communautaire.

Il est complètement absurde que nos deux grandes communautés signent des accords de coopération culturelle avec d'autres pays et régions mais pas entre elles.

Un futur accord culturel serait l'occasion d'un rapprochement entre Flamands et francophones. Les associations culturelles doivent être associées à cet accord. Et dans chaque communauté, des solutions aux problèmes de financement et de locaux des associations de l'autre communauté doivent être trouvées.

N'est-ce pas la moindre des choses dans un pays qui abrite la capitale d'une Europe fondée sur les principes de la démocratie et le respect de la diversité culturelle?

La Flandre finira-t-elle enfin par reconnaître l'existence d'une minorité francophone sur son territoire et la nécessité de la protéger? On peut l'espérer!

 

Edgar FONCK

Extraits de l'intervention du directeur de l'APFF au 3e Colloque de l'Année francophone inter-nationale, "La transmission des connaissances, des savoirs et des cultures", Alexandrie (Egypte), 12-15 mars 2006.


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