Nouvelles de Flandre
Flamands et francophones jouent à quitte ou double

Cette fois les Belges sont obligés de regarder la réalité en face! Ils ont engagé entre eux une partie de "quitte ou double". Ou ils parviennent à définir les règles d'un "modus vivendi" commun raisonnable, ou le pays éclate à plus ou moins brève échéance.

Au cours des dernières semaines, des déclarations ont apporté de quoi alimenter le débat communautaire. Des signaux contradictoires ont été lancés dans le public qui ne sait plus dès lors lequel prendre en considération.

A commencer par le message de fin d'année adressé par le roi au bon peuple assis en famille devant la TV pour l'écouter. Un message souverainement consternant! Il peut se résumer ainsi: "Nous avons rendu visite aux concitoyens de nombreuses villes et partout, tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil!" Un discours empreint d'une telle candeur que Luc Delfosse, rédacteur en Chef adjoint du "SOIR" n'hésite pas à écrire: "Sire, il faut regarder ce pays dans le blanc des yeux plutôt que de verser dans le syndrome de Blanche-Neige." On peut se demander quel ministre d'Etat cacochyme a encouragé le roi à prononcer une allocution aussi naïve!

Pression intellectuelle

Plus sérieuse est la démarche faite par le groupe de pression intellectuel flamand « In de warande » qui publie un manifeste dans lequel il réclame la scission de la Belgique. On trouve parmi eux des hommes d'affaires proches du pouvoir politique, des banquiers et des patrons de presse. Ils dénoncent les inconvénients de la structure compliquée actuelle de l'Etat qui freine, selon eux, le développement économique de la Flandre.

De son côté, Nicole Verschoore fait valoir, dans la "Lettre de Flandre" qu'elle publie régulièrement dans la "Revue générale", que "les quotidiens et hebdomadaires bruxellois francophones traduisent avec prédilection des textes flamands séparatistes". Ces textes, selon elle, "proviennent de journalistes, écrivains et politiciens représentant une fraction et non la tendance générale des opinions".

Certes, les signataires du manifeste flamand ne sont pas investis de responsabilités publiques, mais ce sont ce qu'il est convenu d'appeler des « faiseurs d'opinion ». Leurs prises de position trouvent écho dans les états-majors des partis.

Yves Leterme, par exemple, ministre-président du gouvernement flamand (CD&V) a dit partager en grande partie l'analyse développée dans le manifeste. Il veut bien rester solidaire de la Wallonie, mais à certaines conditions… Evidemment, cette attitude est tactique et fonction des élections en vue et des négociations qui les suivront.

Autres propositions

D'autres voix s'élèvent pour clamer leur inquiétude. Celle, notamment de Wilfried Martens, ancien Premier ministre, qui plaide pour une pause dans le conflit communautaire qui laisserait le temps de la réflexion.

Enfin, les politologues des universités du Nord et du Sud du pays, rassemblés dans un groupe intitulé "Pavia" insistent sur la nécessité de jeter des ponts entre les communautés. Ils annoncent des propositions qui ont pour but de sortir notre système fédéral de l'ornière. Ils vont jusqu'à préconiser un système électoral de circonscription unique. L'électeur pourrait ainsi voter pour n'importe quel candidat politique; les élus seraient tous des élus nationaux.

Les membres du groupe "Pavia" estiment qu'il n'y a pas suffisamment d'espaces de dialogue entre Flamands et francophones.

Il faut se parler via les médias

Il est vrai que les médias francophones ne s'intéressent à ce qui se passe en Flandre que s'il s'agit d'un fait-divers. Ce n'est pas tout à fait vrai en Flandre où, durant des années, un éminent journaliste, Guido Fonteyn, a analysé les événements de Wallonie à l'intention des lecteurs du "Standaard". "LE SOIR" lui a consacré une page entière le 2 janvier: il s'y montre résolument optimiste quant à l'avenir commun des Belges, moyennant cependant une autonomie élargie des régions.

Dernièrement il y a eu une initiative intéressante; les hebdomadaires "Le Vif-L'Express" et "Knack" ont sorti un numéro spécial présentant, en tête-bêche, les titres "Nous les francophones" et "Nous les Flamands". Un échange de bilans intéressant, mais qui reste une initiative sans lendemain.

Demander l'avis des citoyens

Et puis il y a, dans la sphère politique, le "Vlaams Belang" le parti nationaliste de droite flamand qui emporte 25 % des voix en Flandre et qui véhicule le slogan "België barst!" (Que la Belgique éclate!). Ceci est en contradiction avec les sondages qui montrent qu'une très large majorité de la population, en Flandre comme en en Wallonie, entend maintenir la Belgique en vie. Une partie de l'électorat du "Vlaams Belang" n'est donc pas d'accord avec la solution extrême réclamée par le noyau dur de ce parti.

Pour y voir plus clair une fois pour toutes, si on demandait vraiment et officiellement son avis au bon peuple?

Un référendum permettrait aux citoyens de se prononcer clairement sur la volonté de maintenir ou de scinder la Belgique. Et si une énorme majorité des citoyens entend maintenir la Belgique, les hommes politiques seront contraints de trouver à s'entendre sur des solutions raisonnables.

Mais on peut attendre de la part des négociateurs francophones qu'aux demandes flamandes concernant la sécurité sociale ou la scission de l'arrondissement Bruxelles-Hal-Vilvorde, ils opposent la ratification de la convention-cadre sur la protection des minorités nationales et la reconnaissance des droits culturels des francophones en Flandre.

On peut présenter une revendication tout à fait démocratique: un recensement linguistique. On serait enfin devant une situation claire, nette et incontestable.

Une politique réaliste ne peut se pratiquer qu'en se fondant sur des données réelles. Il est temps de voir clair et de résoudre les problèmes en connaissance de cause.

 

Marcel BAUWENS

Président honoraire de l'Association générale des journalistes professionnels de Belgique (AGJPB)
Administrateur de l'APFF


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