Nouvelles de Flandre
A quand un véritable accord entre Flamands et francophones ?

Les années passent; les problèmes communautaires restent. Ils risquent de pourrir dans le frigo où on les relègue régulièrement. Il faut les en retirer le plus vite possible pour les régler définitivement.

Il y a plus de trente ans que nos hommes politiques, confrontés aux litiges linguistiques et incapables d'y apporter une solution qui satisfasse les parties, recourent à la même échappatoire: la mise au frigo. Ils se donnent alors bonne conscience en affirmant: "ces discussions interminables prennent trop de temps. Un temps qu'il vaut mieux consacrer à des dossiers plus importants: la relance économique, la politique de l'emploi et la sécurité sociale."

Le malheur c'est que, quel que soit le dossier politique qu'on ouvre, il en surgit inéluctablement un différend communautaire. Dernier témoin en date: l'aéroport de Bruxelles-National et le survol de l'agglomération bruxelloise. On se renvoie l'excès de décibels aéronautiques entre Flamands et Bruxellois francophones, faisant passer les impératifs communautaires avant les analyses strictement objectives.

Autre problème poussé dans le frigo en dernière minute: celui de la scission de l'arrondissement Bruxelles-Hal-Vilvorde, appelé communément BHV. Voilà un cas vraiment particulier. La question donne lieu à des débats enfiévrés entre militants politiques et laisse de marbre le citoyen ordinaire qui a peine à comprendre de quoi il s'agit. N'empêche! Une pelure de banane qui peut faire chuter un gouvernement.

Guy Verhofstadt n'a pas glissé dessus. Mais il n'a pu trouver un compromis acceptable par les parties, malgré les 42 versions successives d'une note qu'il a introduite dans la négociation. En compensation d'une scission réclamée par les Flamands, mais qui n'en serait plus tout à fait une (!), les francophones obtiendraient le maintien des facilités dans les six communes de la périphérie de Bruxelles. Ailleurs, le régime des facilités serait appelé à disparaître. La suite au prochain numéro!

Autrement

Il est devenu évident qu'il faut renverser la pratique politique suivie jusqu'ici et régler, avant toute autre chose, le contentieux communautaire.

On se rapproche heureusement de cette stratégie. Le gouvernement avait affirmé son intention d'organiser un "forum" où l'on mettrait sur la table de négociation l'ensemble du contentieux linguistico-communautaire avec la ferme volonté d'aboutir à un apaisement définitif, qui permettrait d'aborder tous les autres problèmes dans un esprit de conciliation, un climat dépassionnalisé et sur base de seuls critères objectifs.

Hélas! Suite à l'échec de BHV, c'est l'idée même d'un "forum" qui a été mise au frigo temporisateur. Toutefois, le Premier ministre a laissé entendre qu'il cherchait à restaurer le dialogue par des contacts personnels préliminaires. Il y a donc de l'espoir...

Il paraît d'autant plus urgent de vider ce fameux frigo, que l'atmosphère entre Flamands et francophones se détériore à mesure que le temps passe. Nous assistons avec consternation et irritation à certaines prises de position qui procèdent d'un état d'esprit difficilement admissible. Une série de communes flamandes - Zemst, Hoeilaart, Overijse, Grimbergen - dissuadent les étrangers, et plus particulièrement les francophones, d'acheter un terrain. A Merchtem, il est dorénavant interdit aux commerçants du marché public d'afficher toute inscription dans une autre langue que le flamand!

Aux yeux de l'Europe

Au niveau européen, nous donnons de notre pays une image négative. Deux de nos compatriotes auraient pu accéder à un poste européen important: l'un, francophone, Melchior Wathelet aurait pu être élu président de la Cour européenne de Justice et l'autre, flamand, Marc Verwilghen aurait pu devenir commissaire aux Droits de l'Homme du Conseil de l'Europe.

Ces deux candidats ont été torpillés par leurs propres compatriotes: une manœuvre absolument incompréhensible pour les représentants des autres pays européens. Cet étalement malencontreux de nos querelles intestines au niveau européen intervient à un moment tout à fait inopportun. En effet, la Belgique - et surtout la Flandre! - va être soumise à rude épreuve devant les instances européennes.

La commission des questions juridiques et des droits de l'homme de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe doit entendre les représentants des pays qui n'ont pas ratifié la convention-cadre sur la protection des minorités nationales pour qu'ils expliquent leur refus. Faut-il rappeler que le Conseil de l'Europe a reconnu l'existence d'une minorité francophone en Flandre? Et que la Flandre ne veut pas reconnaître cette minorité?

L'année dernière, Louis Michel, alors ministre des Affaires étrangères, répondant à une question de la sénatrice Derbaki Sbai, devait préciser: " en ce qui concerne le processus de ratification, vous n'ignorez pas que le ministre des Affaires étrangères ne peut ratifier un traité tant que toutes les assemblées concernées n'ont pas donné leur assentiment. Vous n'ignorez pas non plus qu'il y a encore du chemin à faire sur le plan politique pour que chaque entité accepte de donner cet assentiment..."

Espérons que les événements récents feront s'accélérer les choses? En effet, à la suite du dépôt du rapport Cliveti, le Conseil de l'Europe a adopté un texte qui reconnaît l'existence de problèmes pour l'accueil des patients flamands dans les hôpitaux bruxellois. Mais, en contrepartie du souhait de favoriser cet accueil, le texte rappelle la nécessité pour la Belgique de ratifier la convention sur la protection des minorités. Espérons que ce sera bientôt fait…

Trois cultures

Il faut mettre cartes sur table une bonne fois pour toutes et faire suffisamment de concessions de part et d'autre pour régler définitivement le litige communautaire si l'on veut éviter à plus ou moins long terme, l'éclatement du pays... alors que tous les sondages le prouvent: une énorme majorité de la population se prononce pour le maintien de la Belgique.

Nous avons tout à gagner en permettant à nos trois langues et à nos trois cultures de s'exprimer librement sur l'ensemble du territoire. Sans remettre en cause, bien entendu, le statut linguistique des régions.

 

Marcel BAUWENS

Président honoraire de l'Association générale des journalistes professionnels de Belgique (AGJPB)
Administrateur de l'APFF


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