Stéphanie Boale vit en Belgique depuis une vingtaine d'années mais, elle n'oublie pas sa ville natale, Mbandaka, située dans la Province de l'Équateur en République démocratique du Congo.

Auteure de romans et de poésie, Stéphanie veut aider les jeunes de sa région par le biais de la littérature, qu'elle considère être un vecteur de transmission du savoir, de partage d'expériences et de sauvegarde des traditions. Avec l'appui du Richelieu international Europe (RIE) et de l'Association pour la promotion de la francophonie en Flandre (APFF), elle vient de publier un deuxième recueil de textes écrits par des jeunes lycéens. Ses actions ont valu à cette femme passionnée et engagée de se voir décerner le titre de "Femme de Paix" du Conseil des Femmes de Belgique.

Un espace culturel en plein essor

En 2016, Stéphanie met sur pied l'asbl BUKU qui, avec de très petits moyens financiers (souvent sur fonds propres), crée, dans le centre de Mbandaka, un espace culturel comprenant une bibliothèque ainsi qu'une salle de lecture. Un véritable lieu de rencontre, très apprécié par les jeunes.

Les projets de BUKU prennent de l'ampleur. Les professeurs et les élèves répondent présents avec un enthousiasme inattendu. La bibliothèque doit même étendre ses moments d'ouverture de 3 à 6 jours par semaine. En juin dernier, cependant, elle est tenue de quitter les locaux trop étroits que l'Institut Supérieur Pédagogique mettait à sa disposition. Le moment est venu, pour BUKU, de disposer de ses propres infrastructures.

L'asbl a acheté un terrain pour construire un centre culturel qui bénéficiera également aux divers partenaires locaux comme le Club Richelieu éducation, l'association des professeurs de français et d'histoire, des groupements de jeunes ou le CLAC, le Centre de lecture et animation culturelle mis en place par l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF).

Une simple maison est en construction pour abriter, dans l'urgence, la bibliothèque. Pour réaliser le projet de centre culturel, Stéphanie a fait appel à un architecte belge, Marc Somers.

Stéphanie Boale et Marc Somers ont en commun l'amour et la connaissance de l'Afrique ainsi que l'envie de mettre en avant les potentialités de sa population. Marc est spécialisé en urbanisme écologique. Il fait partie de "l'Atelier Espace Architectural Marc Somers", qui regroupe des architectes motivés par "le mieux être de l'homme et son développement global en harmonie avec la nature et 'sa' nature". Dans cette optique, Marc a réalisé de nombreux projets en Europe et en Afrique.

Architecture organique

Il a aussi à cœur de mettre en avant une architecture participative. Pour le projet à Mbandaka, il veut impliquer, dans la construction du nouveau bâtiment, la communauté locale et principalement les jeunes qui fréquentent le centre culturel. Une participation active de la population mais également, une architecture et des techniques qui s'adaptent à la culture de la région.

Pas question d'implanter, à Mbandaka, une ville de province peu accessible, une construction en béton sans âme et sans lien avec l'environnement. Marc veut privilégier une architecture organique qui s'inspire de la nature, de ses formes et de ses matériaux. "Pourquoi utiliser des poutres en béton alors que sur place, les arbres sont très solides et ne coûtent pas grand chose.". Il a recours au bois pour l'ossature, au pisé (de la terre mélangée à de la paille) pour les murs.

Zéro-énergie

L'énergie renouvelable occupe aussi une place importante dans le projet: pas d'appareil pour l'air conditionné. La ventilation se fait par une circulation naturelle de l'air entre une tour à vent, placée tout en haut de la construction et un puits d'eau, installé tout en bas.

Le Centre culturel sera aussi équipé de panneaux solaires innovants, mis au point et brevetés, très récemment, par la société belge NRsun, à laquelle collabore Marc. Ces panneaux ont la particularité de pouvoir être placés à la verticale, tout en étant aussi performants que les panneaux traditionnels installés sur les toits. Ils peuvent être intégrés aux fenêtres ou placés sur un mur. Dans le cas des murs en pisé, qui ne peuvent être mouillés, ils servent, en même temps, de protection contre la pluie. La société belge envisage d'installer une usine de production en RDC et de faire don, à titre promotionnel, de panneaux à BUKU. Par ces techniques, le centre sera largement autonome. Les surplus d'énergie pourront participer également à l'autofinancement du projet.

Marc Somers a imaginé un bâtiment en hauteur, accessible par un large escalier où les jeunes pourront s'installer à leur guise et s'approprier les lieux. Composée de grands volumes modulables superposés, abritant des locaux polyvalents équipés de cloisons modulables, la structure est soutenue par des arbres et couverte de végétation. Au rez-de-chaussée, un amphithéâtre extérieur prend place sous le bâtiment pour être à l'abri du soleil et de la pluie. Un magnifique projet qui devrait coûter dix fois moins cher qu'une construction de superficie équivalente, réalisée dans nos contrées.

Anne-Françoise COUNET

Informations: http://www.buku-litterature.com