Nouvelles de Flandre

C.Q.F.D.
Cercle de qualité du français dynamique

 

Fondé en 1983, à la Maison de la Francité, à Bruxelles, et appelé d'abord Atelier de vocabulaire, le C.Q.F.D. est un observatoire du français contemporain. C'est aussi un groupe de travail dynamique qui tente de contribuer à la qualité de notre langue. À côté de l'examen de belgicismes, de néologismes et de difficultés lexicales courantes, le Cercle s'occupe spécialement du traitement des anglicismes.

Le C.Q.F.D. est composé de linguistes, de traducteurs et d'amateurs attentifs aux questions de langue. Tous sont remarquables: deux Personnalités Richelieu, le Père Joseph Boly et André Goosse; cinq membres belges du Conseil international de la langue française; de nombreux professeurs... Une passion commune les anime: l'amour de la langue française.

Depuis 1945, la langue française souffre d'anglomanie. Celle-ci concerne la syntaxe, la prononciation, les graphies, et principalement le vocabulaire. Dans l'usage courant, comme dans les langues de spécialités, le recours à l'emprunt anglo-américain est fréquent. En Communauté française de Belgique, à Bruxelles surtout, on le constate dans la presse, dans les services publics, à l'aéroport national, dans la publicité, dans les enseignes et dans les offres d'emploi. Le franglais dénoncé par Etiemble en 1964 se porte bien.

Or les mots ne servent pas uniquement à désigner les objets ou les émotions, ils incluent une perception du monde et d'autrui ainsi qu'un mode de penser. Il existe un rapport étroit entre langue, identité et culture. La langue constitue l'expression fondamentale d'une identité culturelle. Le plurilinguisme qui règne en Belgique et, pour les francophones, la présence en français d'emprunts étrangers, opaques ou incompréhensibles, engendrent chez certains un sentiment d'insécurité linguistique, qui peut entraîner une crise d'identité. C'est une des raisons pour lesquelles le C.Q.F.D. examine les emprunts anglo-américains.

Des fiches d'anglicismes et de substituts français

Le C.Q.F.D. publie les recherches sur les emprunts et les résultats de ses discussions sous forme de fiches lexicales. Celles-ci comportent des propositions d'équivalents français. L'usage jugera de leur pertinence.

Parfois, le Cercle reprend des substituts recommandés en France. Par exemple: payer-prendre (cash and carry), conteneur (container), franchisage (franchising); et restauration rapide (fastfood). Souvent, le C.Q.F.D. crée des équivalents français. En tant que lexicologue, je rédige les fiches et explique la formation des mots nouveaux.
Publipostage - action de (-age) de faire de la publicité par voie postale- remplace mailing.
Collenote - formé par référence à bloc-notes - peut se substituer à post-it.
Télévente ou télé-achat traduisent teleshopping.
Covoiturage - composé de voiturage, "transport en voiture", et du préfixe co-, dérivé du latin cum, qui signifie "avec" - prend la place de carpooling.

Parues de 1984 à 1993 dans la revue Questions de français vivant, les fiches lexicales sont glissées actuellement dans le bulletin Francité. Plus de deux cents fiches sont publiées. J'en ai revu cent vingt qui sont réunies dans le volume Anglicismes et substituts français, paru en 1991 aux Éditions Duculot.

Ces fiches témoignent simultanément du franglais contemporain et de la richesse lexicale de notre langue. Sans doute parlons-nous franglais; mais, lorsque nous le voulons, nous pouvons nommer la modernité en français.

 

Michèle Lenoble-Pinson, présidente

 

Supplément à Francité, n°21/22, juin 1998
Cercle de qualité du français dynamique

Anglo-américanisme

En français

email ou e-mail n.m.

COURRIEL n.m.
MÉL n.m (Acad. fr.)


I. Justification des équivalents français

Le mot-valise courriel est construit à partir de courrier électronique: courri[er] el[ectronique].
Phonétiquement, la finale -iel évoque d'autres termes informatiques: logiciel, didacticiel, progiciel.

"Plutôt que d'adresse électronique ou Email (prononcer Iméle) les Francophones qui fréquentent la toile (et respectent notre langue commune) préfèrent parler de courriel, néologisme de bon aloi parfaitement construit" (Lettre de la Francophonie, mars 1996, p.3).

"Le secrétariat général de l'Afidés, à Montréal, nous signale le changement d'adresse de son serveur. [...] Le courner électronique, ou courriel, de l'Afidés doit donc être, à l'avenir, adressé à <afides@agrics.qc.ca>" (loc. cit, p. 4). En Belgique, depuis février 1996: "Courriel francite@skynet.be" (Francité, février-mars 1996, p.1).

Autres propositions. Puisque la transmission du courrier ou du message se fait non pas par le réseau des postes, mais par un réseau de télécommunications ou de télématique, on pourrait privilégier l'élément télé- plutôt que l'aspect électronique; d'où, sur le modèle de téléphone, télégraphe, télécopie: télécourrier, n.m. Aussi, câble, n.m.: Envoyer un cable.

Verbes proposés (à la place des barbarismes iméler, imailer [?] et mailer, entendus dans "Imélez-moi ça", "Je vous ai imélé ma réaction à votre note", "ll a mailé sa réponse"): courriéler, téléposter, câbler, "transmettre un message par câble": On vous câblera des instructions.


II. Etude de l'anglo-américanisme

Domaine. Messagerie électronique.

Sens et substituts français correspondants. L'emprunt E-mail peut avoir trois acceptions.

1°) Le service de courrier électronique

En anglais: electronic mail, abrégé en E-mail, terme très populaire, bref, passe-partout,même dans les périodiques francophones québécois et belges; compris de tous.

En français: messagerie électronique;
courrier électronique, abrégé en courrier dans un contexte clair ou en
courriélec et courrelec: ces formes ont peu de chances de s'implanter;
courriel, fait image, est attesté au Québec et en Belgique francophone.

2°) Le message lui-même

En anglais, par extension: E-mail, très populaire, même en français au Québec et en Belgique.

En français: message de courrier électronique et
message électronique, abrégés en message dans un contexte clair; courriel.

3°) L'adresse de courrier électronique

En anglais: encore E-mail; s'emploie en français aussi, au Québec et en Belgique.

En français: adresse de courrier électronique et
adresse électronique, abrégés en adresse dans un contexte clair ou en
adel et adèle: ces formes ne font pas l'unanimité et sont peu attestées; courriel.
(Cf. lettre de Marcel Bergeron, terminologue, Office de la langue française du Québec, 21.10.96.)

Attestation. "L'e-mail (pour "electronic mail", courrier électronique) est une des fonctionnalités les plus importantes du Net. Elle permet d'envoyer ou de recevoir des messages avec n'importe quel abonné. Sous forme de texte, ces messages peuvent éventuellement être accompagnés de documents pouvant contenir une mise en page sophisti quée, des graphiques, des images et même du son ou de la vidéo (sous réserve de certaines limites techniques)" (L'Echo, 28.01.97, p. 11).

Abréviations. Sur les documents professionnels, devant l'adresse électronique, I'Office québécois propose les formes abrégées: C. élec., Courrier é. ou C.E. Ou il suggère de ne rien mettre du tout puisque l'utilisation du signe a commercial "@" dans l'adresse lève l'ambiguité sur sa nature.

L'Académie française préconise Mél. (adresse de m[essagerie] él[ectronique]), qui cherche à s'aligner sur Tél. (numéro de tél[éphone]).



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